Antonio Domingues
Photographies

Sérénité

Sérénité

Vivre un instant de profonde sérénité, goûter à ce moment magique où l’âme n’est plus troublée, apaisée et libre, à l'écoute de ce qui l'entoure et pleinement intégrée à un tout harmonieux.

Cette vision d'un monde parfait où vous avez l'impression que tout est calme et beau, suscite en vous un sentiment d'émerveillement. La perception qu'un miracle s'opère, des événements a priori banals et simples devenant merveilleux.

Vous vous construisez, l'espace d'un instant, un monde idéal aux émotions maîtrisées, où le doute et le jugement n'ont plus leur place, un mécanisme d'idéalisation pour réussir à vous approprier cet état de bien-être indispensable que vous espérez pérenne.

Nous avons tous une vision singulière de cet état qu'est la sérénité, un état de bien-être global, d’apaisement, de bonheur, de quiétude totale, brève ou longue… mais nos visions ont en commun le sentiment d'une harmonie, d’une perfection qui nous apportent satisfaction et équilibre.

Nous la construisons à partir de ces choses du quotidien que nous embellissons, de ces moments fugaces où nous apercevons la beauté de la nature et des êtres qui nous entourent, autant de marches nous rassurant sur notre capacité à y accéder.

Mais idéaliser ce sentiment, sans chercher à lui donner un ancrage profond par un travail sur soi, ne lui permettra pas de se concrétiser ou s'il se concrétise, il sera probablement partiel et éphémère.

Vous aurez alors l'impression de toucher la sérénité du doigt, mais elle n'en demeurera pas moins fondamentalement inaccessible. Vous n’arriverez à la percevoir que l'espace d'un instant, et sa perception sera sans doute illusoire. Un simple éclat de lumière survalorisé, comme pour vous signifier qu'il vous faudra sans doute toute une vie pour la comprendre et lui donner du sens.

Sans ancrage, ce sera une quête difficile et longue durant laquelle les épisodes de bien-être et d'angoisse se succéderont, la lumière ne triomphant de l’ombre que par intermittences.

Cette quête vous livrera souvent à un profond désarroi et vous laissera un goût amer, la crainte de ne ressentir la sérénité que lors d’un court instant avant de la voir se dissiper, vous plongeant dans un état encore plus éprouvant que le précédent.

Sommes-nous condamnés à rester dans un état intermédiaire afin d’éviter cette succession d'états trop intenses sans possibilité d’atteindre cette sérénité dont le prix est trop élevé ?

Finalement, cette quête en vaut-elle vraiment la peine ? 


(Tirage : gomme bichromatée / cyanotype)

Using Format